S’il est évident que l’humain est protéiforme, multiple, on semble pourtant souvent choisir de manquer la véritable rencontre de l’individu qui nous place inéluctablement en face de cette complexité. Nous préférons la faire correspondre à une vision plus simple, plus spécifique, en optant de valoriser une étiquette au détriment d’une autre : “femme”, “étranger”, “enseignant” etc. Mais qui ne rencontre pas l’autre est-il capable de se faire face ? Dans l’optique où l’on choisit de dialoguer avec le reflet que nous renvoie le miroir, on prend aisément conscience que l’on ne se réduit pas à une classification sans échapper à cette bienheureuse contradiction.
Selon Nietzsche, le “Grand Style” consiste à faire exister en soi deux puissances qui seraient apparemment paradoxales : les puissances réactives qui, comme l’adjectif “réactif” l’indique, répondent à un stimulus provoqué par l’extérieur et les puissances créatives qui elles, sont de l’ordre de la vision des “véritables artistes” qui eux “créent” non “en réaction à” mais, depuis le fond de leur être en échappant ainsi au mimétisme primaire. Autrement dit, laisser une place à cette contradiction que l’on tend à vouloir faire disparaître en nous, lui en constituer une au lieu de la nier ou de lutter contre elle, relèverait du “Grand Style”.
Et si nous transposions cette théorie sur le rapport à l’Autre ? Car finalement, tenir compte de ses propres contradictions c’est accepter l’altérité en son sein. N’attendons pas d’être les victimes d’un regard stigmatisant pour remettre en question nos propensions à la catégorisation.
Parbleu et quant à avoir du style, autant qu’il soit doublement grand !